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Vive les anciennes!
22 juin 2009

L'ancètre des ancètres

Quand on est amateur de voitures anciennes, une visite s'impose : le Conservatoire des Arts et Métiers à Paris.
C'est là qu'est l'Ancètre, le Premier, les balbutiments de la locomotion automobile, le fardier de Nicolas Cugnot.

fardiergravure

Nicolas-Joseph Cugnot (26 février 1725 - 10 octobre 1804) ingénieur militaire a dessiné en 1769 un premier fardier dans le but de tirer les canons. L'idée lui trottait dans la tête depuis 1753! Le premier modèle avait été réalisé aux frais de l'inventeur qui y engloutit tout son argent.

Ayant interessé le Surintendant des Armées de Choiseul et le général Gribeauval il obtint ensuite des crédits de Louis XVI pour construire et développer le fardier qui est exposé à Paris.
Un premier modèle avait la moitié de la taille de celui qui est exposé.
A cette échelle, il avait prouvé qu'il pouvait fonctionner .... quelques 12 minutes. Il fallait attendre que la pression retombe, ouvrir la boite à feu, recharger en bois, attendre que la pression remonte etc.
Malgré ces performances faibles, le premier fardier a fini dans un mur, car, la direction était peu fiable et il n'avait pas de freins!
Cette mauvaise expérience a tout de même convaincu l'état major de financer la construction d'un nouveau fardier en 1770, en laissant à disposition de Nicolas Cugnot ce que l'on faisait de mieux pour fabriquer les cylindres, la foreuse à canons de l'arsenal de Strasbourg et en faisant réaliser la mécanique par Brezin, le meilleur mécanicien de Paris.

La facture totale fut de 20.000 livres, somme considérable, à comparer avec la pension trimestrielle du dauphin qui s'élevait à 18.000 livres. Le fardier fut achevé en juin 1771 et devait être essayé en juillet à Meudon, en présence de Gribeauval .... qui ne fut jamais disponible. Ordre fut donné à veiller à l'entretien du fardier en attendant le bon jour ..... qui ne vint jamais.

A la révolution, les différents gouvernements qui se sont succédés ont été très intéressés par la machine et avaient ordonné qu'on veille à son entretien. Rolland, ministre de Napoléon Bonaparte découvrit le fardier et  entrevit le parti qu'on pouvait tirer d'une telle invention pour déplacer les canons. Bonaparte ne fut pas convaincu mais ordonna qu'on le préserve. Après la mort de Cugnot, alors que Richard Trevithick, Marc Seguin et Robert Stephenson avaient adapté avec succès la vapeur et surtout la bielle au chemin de fer et que le fardier n'était plus de mode, il a été décidé de le conserver, ce qui nous vaut de pouvoir toujours admirer la première automobile,
Si le premier modèle avait réussi à fonctionner, le deuxième modèle lui était confronté à des problèmes d'étanchéité de la vapeur au niveau des cylindres et des pistons, car les segments étaient encore à inventer.

Il faut se remettre dans le contexte du 18ème siècle pour mesurer à quel point cette machine était compliquée à réaliser : à cette époque, chaque clou, chaque vis, chaque écrou était fabriqué à la main, rien n'était standardisé, car tel écrou n'allait que sur une vis bien précise.

fardier3
Voici le fardier capable en théorie de porter 4 tonnes.

Enfermé dans le contexte hippomobile, Cugnot avait attelé la machine au chariot, comme on attèle un cheval. Le chassis était réalisé en bois et le chassis qui porte la chaudière et les cylindres, réalisé en fer, bien fermement boulonné au chassis de bois.

Pour donner une meilleure idée de sa taille, les deux personnes donnent l'échelle
fardier2

Ce fardier est la première traction avant au monde.
fardier1
Le sytème de transmission à roue à rochets parait bien antique, mais il faut savoir qu'à cette époque, personne n'avait encore imaginé utiliser la bielle (qu'on connaissait depuis l'invention du rouet) pour transmettre le mouvement. Les "modernes" machines de Newcomen qui pompaient l'eau dans les mines ne savaient fonctionner qu'en faisant des allers-retour.
Ce que Cugnot avait imaginé, c'était de pousser sur la roue à rochets qui venait droit de l'horlogerie pour transmettre le mouvement circulaire à la roue, ce qui était un bond en avant magistral dans l'histoire de la mécanique. Sur le premier modèle, les pistons battaient jusqu'à 180 coups par minute et frôlait les 4 kilomètres/heure!
fardier92
Cette vue montre l'autre côté de la transmission.

On aperçoit le guidon qui permettait de diriger le fardier et qui devait nécessiter une force considérable, tout le poids du mécanisme reposant sur cette unique roue avant. Il avait fallu attendre 1894 pour voir le volant utilisé de façon courante.

Dans le musée, une structure métallique porte maintenant la chaudière et l'avant du fardier, qui sans celà se serait brisé depuis longtemps.

La cylindrée unitaire est de 3.85 litres, soit 7,7 litres au total, comme un V8 américain de la grande époque!

fardier5
Voici le chassis qui était concu pour porter 4 tonnes
fardier7
L'avant du fardier. Le remplissage de la chaudière se faisait par une petite porte à l'avant.

fardier8

Détail du "poste de conduite" très sommaire, pas de manomètre pour savoir combien de pression il y avait dans la chaudière.
La grande tige permettait d'ouvrir le robinet de vapeur, qui arrivait au distributeur via le tuyau central.
Remarquez le sytème de distribution par chaine, dispositif ultra moderne pour l'époque. Sur les machines de Newcomen, c'était un homme qui devait commander l'admission de la vapeur!

Nicolas Cugnot, dont aucun portrait n'est connu, qui n'avait aucune fomation mécanique car il était avant tout ingénieur militaire spécialisé dans les fortifications, avait réussi à concevoir, fabriquer et faire fonctionner le premier véhicule automobile du monde.
Le fardier exposé au Conservatoire des Arts et Métiers, qui n'a jamais été essayé, témoigne de la hardiesse d'hommes qui avaient osé aborder des terres totalement inconnues et qui ont défriché le terrain pour aboutir plus d'un siècle plus tard à l'automobile : Carl Benz en 1884, Gotlieb Daimler et Wilhem Maybach en 1887.
Chapeau Monsieur Cugnot!

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